L’auteur de la tuerie de Virginia Tech s’est
procuré ses armes relativement facilement, la Virginie étant un des états
américain le plus libéral en la matière. Qu’en est-il chez nous depuis la
récente modification de la législation ?
En
Belgique, la législation a été sérieusement durcie depuis le 9 juin dernier suite
au raid meurtrier de Hans Van Themsche, à Anvers. Pour rappel, il avait abattu
en pleine rue la petite Luna et sa nounou malienne
Oulemata et grièvement blessé une femme turque Songul Koç. Il n’est maintenant
plus possible de se procurer d’arme sans avoir obtenu d’autorisation
provinciale préalable. La nouvelle loi exige un motif légitime pour toute
détention d’armes.
Cette mesure législative a été prise dans
l’urgence, pour réagir à l’émotion populaire suscitée par ce fait divers
dramatique. Or c’est précisément cette célérité qui est pointée du doigt par de
nombreux acteurs du secteur de l’armurerie.
A commencer par l’Union Nationale de
l’Armurerie, de la Chasse et du Tir, qui regroupe des détaillants, des
grossistes et des manufactures ainsi que des chasseurs et des tireurs. Dès le
début du processus d’élaboration de la loi, l’Unact a été consultée. Cependant,
ses recommandations ont été peu suivies par la ministre de la Justice. Rapidement,
l’Unact a déposé un recours auprès de la cour d’arbitrage qui a confirmé le
caractère anticonstitutionnel de certaines dispositions de la nouvelle loi,
notamment en ce qui concerne le droit à la propriété. Suite à cela un groupe de
travail a été crée pour évaluer la nouvelle loi. Il a adressé au gouvernement
fédéral une résolution contenant ses recommandations en espérant qu’elle soit
adoptée avant la dissolution des chambres, ce qui n’est pas garanti. Au niveau
des provinces, il semble que les services soient débordés et que les renforts
promis n’y aient pas encore été affectés.
Concrètement, pour les armuriers, les
problèmes sont multiples. Ils pointent du doigt l’impasse dans laquelle ils se
trouvent. Ils ne peuvent pas vendre d’armes sans autorisations du gouverneur de
province. Le hic est que ces autorisations ne sont pas encore délivrées dans
une grande partie du pays. Le chiffre d’affaires de nombreuses armureries est
en baisse. Le manque à gagner est encore difficile à évaluer mais il est
certain que certains commerces vont avoir du mal à se remettre de cette situation
si elle venait à s’éterniser.
Les armuriers sont très critiques envers
la nouvelle loi. Ils la trouvent incomplète, difficile à mettre en application
et beaucoup trop restrictive. S’ils sont d’accord de faire évoluer la
législation, cette mouture ne trouve pas grâce à leurs yeux. Un armurier du
Brabant wallon déclare : « On
s’attaque aux gens honnêtes, on leur demande de recommencer tout une série de
tracasserie administrative tous les cinq ans et en plus, ils vont devoir payer
une taxe à chaque fois. » Il continue : « Qu’on durcisse la loi, je le comprends mais
là, c’est vraiment excessif, on ne peut plus rien vendre ! » Même
son de cloche dans une grande maison bruxelloise : « Non seulement cette loi nous empêche de
faire notre métier, mais en plus, son caractère rétroactif est vraiment
difficile à accepter. Tous les achats effectués six mois avant les tragiques
événements d’Anvers sont considérés comme suspects » La plupart
s’insurgent contre une vision des tireurs comme des gens violents rapidement
enclin à faire usage de leurs armes en cas de désaccord. « Il y a bien plus de violences dans les
stades de football que dans les clubs de tir ! Tout ce qu’on va réussir à
faire avec cette loi c’est stigmatiser les gens qui sont en règles depuis des
dizaines d’années. Vous croyez vraiment que cette loi va empêcher un
déséquilibré de commettre un crime si la pulsion lui vient ? »
Bruno Van Dam